Carnet de voyage Côte d’Ivoire et Cameroun chez Chocolatitudes

, par France Nahum Moatty chocolatez-vous membre

Nous sommes accueillis dans la boutique aux couleurs tendres, par Laurence Alémano, ancienne chercheuse au CIRAD à Montpellier, qui a ouvert cette boutique il y a 12 ans. Elle nous offre un chocolat chaud préparé à partir d’un cacao en poudre, assemblage de la marque Quai Sud Bio, du lait de coco et de l’huile essentielle de citron. L’impression est très agréable. Les notes de coco se perçoivent en attaque, puis le cacao a une belle longueur en bouche. Pour accompagner ce chocolat, elle nous propose des sablés aux huiles essentielles de citron recouverts de chocolat.
À partir de diaporama, Laurence, nous fait voyager entre la Côte d’Ivoire et le Cameroun. Deux pays que nous ne connaissons pas bien, tant au niveau politique, économique ou social. Au XXIe siècle, c’est l’Afrique de l’Ouest, et en particulier la Côte d’Ivoire, qui produit la majeure partie du cacao mondial (43,1%, le Ghana 19,3%, puis le Nigeria et le Cameroun). La Côte d’Ivoire a une production annuelle de 2 millions de tonnes. Près de 80 % de la production mondiale provient aujourd’hui d’exploitations familiales de moins de 5 hectares. Des causes économiques sont aussi avancées, 9% des plantations sont des exploitations familiales dans lesquelles les enfants des planteurs travaillent. Ces enfants subissent les effets néfastes des pesticides utilisés pour la production, ils portent des charges supérieures à leur poids, ils sont blessés avec les machettes et pire que tout, il y a un trafic des enfants esclaves. Un documentaire est passé sur Arte il y a quelque temps. Aujourd’hui les grands groupes comme les sourceurs viennent en aide à ces planteurs pour leur assurer un revenu plus décent, permettre à ces enfants d’aller à l’école et rendre la culture du cacao plus attractive.
Après l’indépendance, le choix du Président Félix Houphouët-Boigny est de privilégier le secteur primaire par rapport au secondaire. Le cacao va connaître un développement fulgurant : entre 1960 et 1970, les cultures de cacao triplent, la production atteint 312 000 tonnes. Le prix du cacao très élevé baisse d’années en années bien que le coût de la vie augmente. Il s’opère alors une spéculation. L’état se base sur le prix de la bourse. Il garde 40% et paie 60% aux planteurs. 30% de la population travaille dans le cacao.
3 multinationales se partagent le marché

  • Barry Callebaut 40% du marché mondial dont le siège est en Suisse
  • Cargill aux USA, et quelques usines en France
  • Olam, en Inde

L’un des enjeux pour le moyen et long terme est l’adaptation de la culture des cacaoyers au dérèglement climatique. En 2012 Naga Coulibaly, secrétaire général du Copal (Alliance des pays producteurs de Cacao) alertait la communauté internationale sur le fait que l’Afrique fournit 70 % de la production mondiale, et que selon les modèles du réchauffement climatique elle sera très affectée par les changements globaux ; « S’il n’y a pas une réaction rigoureuse aux menaces, il va sans dire que (...) dans cinquante ans ou un siècle on ne pourra plus avoir du cacao ». Les plants sont déjà affectés par ces changements : Dans une région productrice de Côte d’Ivoire la grande saison des pluies a été réduite de 30 jours environ, passant de 4 à 3 mois (de 1956 à 2009), ce qui se traduit par des baisses de production.
L’évolution des grands producteurs mondiaux sur la décennie 2010 reste dominée par le leader incontesté qu’est la Côte d’Ivoire, selon Arcadia, déclinaison africaine du Rapport Cyclope. À elle seule, elle représente 40 % de l’offre planétaire de petites fèves et produit deux fois plus que son suivant immédiat et voisin d’Afrique de l’Ouest, le Ghana. Sur les cinq premiers producteurs mondiaux, quatre sont des pays d’Afrique de l’Ouest.

La dégustation proposée

  • Morin Guenon 63% cabosse d’Amenolado, arôme de noix de coco, très rond, notes de noisettes
  • Mon choco, chocolat cru au gingembre frais et séché et non confit comme la plupart des autres chocolats que nous connaissons. Le gingembre est très puissant, plus rustique. Ce chocolat est fabriqué en Côte d’Ivoire
  • Yéré, en langue des commerçants ivoiriens veut dire "authentique"
    Fèves de cacao bio achetées à une coopérative à un prix bien supérieur à celui du marché. Fabrication de la pâte de cacao en Côte d’Ivoire. Il est au piment et à la fleur de sel
  • chocolat au lait aux chips de banane. C’est un chocolat bio non certifié encore fabriqué en Côte d’Ivoire ; le chocolatier ivoirien.

Son voyage au Cameroun a permis à Laurence de connaître Astrid. Cette femme passionnée qui s’intéresse au cacao entre en contact avec la maison La Reine Astrid, rapprochement des noms obligent ! Elle leur envoie un échantillonnage de sa production et ils décident de l’aider.
Le gouvernement camerounais a mis en place un programme "New Generation" qui pousse les citadins à revenir à la campagne pour travailler le cacao. Les femmes sont intégrées à ce plan.
Suite de la dégustation

  • Cameroun 70% de Morin
  • Cameroun Lékié une tablette au lait à 48%, Morin, très agréable au palais, bon équilibre, bien lacté.

Pour conclure, le risque pour l’avenir selon certains serait une pénurie du cacao en Afrique de l’Ouest s’il n’y avait pas de relai avec les pays d’Asie. Le réchauffement climatique étant la cause principale de cette pénurie surtout face à l’augmentation de la consommation des pays émergeants comme l’Inde, le Brésil ou la Chine. Mais malgré ces risques, les 25% de la population ivoirienne qui vivent du cacao ne sont pas près d’y renoncer. IL faudrait que les prix payés aux planteurs augmentent pour leur garantir une vie meilleure, dans la mesure ou le consommateur des pays riches accepte.